Ce terrain d’environ 3 ha, situé en centre-ville, entre la Mairie d’Issy et Corentin-Celton, était l’une des dernières emprises foncières d’importance pouvant accueillir des projets novateurs. Propriété d’une filiale de la Caisse des Dépôts, il a été libéré par Orange Lab’s, locataire des lieux en début d’année 2016.
Un projet d’aménagement vient d’être dévoilé aux Isséens. L’examen de ce projet a conduit aux commentaires suivants et à un certain nombre de propositions.
1° Un projet en apparence équilibré avec logements, bureaux, commerces, espaces verts et équipements…
Selon la présentation d’Altarea Cogedim attributaire de l’appel d’offre lancé par la filiale de la Caisse des Dépôts, le projet « développera un véritable cœur de ville » avec, présenté dans cet ordre :
- Un parc urbain de 13 000 m²
- Des commerces de « nouvelle génération » de 15 000 m²,
- Un centre de création numérique,
- 40 000 m² de logements, soit, à raison d’une moyenne de 70 m² par logement, environ 570 logements,
- 40 000 m² de bureaux,
- Des équipements publics dont une école et une crèche.
2° Une structure en berceau qui donne à l’intérieur une impression d’ouverture et de verdure
Des terrasses étagées descendent vers des allées commerçantes et quelques espaces verts. Vu de l’intérieur, l’ensemble est séduisant, équilibré.
Mais la présentation des espaces verts comporte quelques imprécisions d’importance. Qu’en est-il du parc urbain de 13 000 m² ?
Celui-ci comprend en fait, 4 600 m² de terrasses privatives, réservées aux habitants de ce cœur de ville et 4 000 m² de parc en pleine terre. Il n’y a pas de précision sur la consistance du reste.
Autrement dit, 4 000 m² seulement sont ouverts à l’ensemble des isséens et l’on peut supposer que la partie non précisée correspond à des alignements d’arbres.
Dans un contexte d’urbanisation et de densification, cet espace de 4 000 m² au regard de la superficie d’une parcelle de 3 ha est appréciable, mais pourquoi faire valoir 13 000 m² ? L’expression parc urbain apparaît plus comme un leurre à finalité marketing que comme une réalité.
3° De l’extérieur une structure massive avec d’importantes nuisances à craindre pour les riverains
De l’extérieur, la structure est très massive. Les bâtiments sont construits en limites de parcelles et montent à 27 ou 32 m de haut le long de rues très étroites. A l’évidence ils provoqueront des nuisances pour le voisinage : déperdition de lumière et d’ensoleillement, encombrement de la circulation rejetée en dehors de ce qui a l’aspect d’une forteresse, même si cette massivité a l’avantage de constituer une barrière phonique pour les futurs habitants…
Conformément à ce qui avait été annoncé lors de la dernière révision du PLU, « l’épannelage » rue Horace Vernet devrait être plus prononcé pour préserver un peu de lumière dans cette rue malmenée par le projet (effet canyon, circulation, livraisons, …).
On déplore par ailleurs le manque d’information sur les « soutes » nécessaires à la logistique du nouveau quartier.
4° Une densification accrue en Centre-Ville avec des conséquences sur l’environnement et la qualité de vie des habitants
Tel qu’il est présenté, il est clair que ce projet constitue un indéniable progrès comparé aux propositions des années précédentes. On pense en particulier à la « Tour Ferrier » accolée à un gigantesque centre commercial.
Néanmoins, dans la mesure où il n’y aura pas de circulation automobile à l’intérieur de cet espace, on doit craindre des difficultés de circulation dans les rues étroites qui l’entourent (*). En effet, si l’on tient compte de la hauteur des immeubles (huit étages) donnant sur l’artère principale et les rues adjacentes, la population nouvelle engendrée par cette densification et le nombre de véhicules supplémentaires, la circulation et le bruit risquent de devenir insupportables en plein centre ville. La pollution atmosphérique qui ne cesse d’augmenter va certainement atteindre des pics inégalés.
Est-il par ailleurs, prévu de planter des arbres autour du complexe pour réduire la pollution et le stress des habitants?
En matière d’environnement, cet aspect est défini de façon purement technique : technologie informatique et prouesse en énergie positive. Est-ce suffisant pour assurer la qualité de l’environnement ?
5° Un espace complétement fermé sans ouverture sur la ville
Selon la maquette, le projet apparaît enclavé dans la ville avec des accès limités et très étroits. Il n’est jamais question de son insertion dans le quartier, or une ville ne doit pas être constituée de morceaux accolés. Il paraît indispensable de prévoir l’ouverture sur le reste de la ville.
Cette ouverture pourrait se faire par la suppression ou la réduction du bâtiment faisant face au Séminaire. Cela aurait, bien sûr un impact négatif sur la rentabilité de l’opération pour le promoteur mais un impact, ô combien positif pour l’intégration de ce nouveau quartier et l’esthétique de l’ensemble d’autant qu’à la place de l’immeuble ou pourrait aménager une place en triangle avec un côté constitué par l’avenue du Général Leclerc et les deux autres pénétrant dans le site.
A défaut de supprimer le bâtiment, il serait possible de le doter au rez-de-chaussée d’ouvertures libérant des percées visuelles depuis et vers le nouveau quartier ou d’un grand porche qui permettrait le passage et la vue sur l’avenue sans remettre en cause l’immeuble. Ce porche pourrait être valorisé par l’installation de commerces bénéficiant d’un emplacement exceptionnel dans ce lieu de passage.
6° Une opportunité pour relier les quartiers de la Mairie et de Corentin Celton
Dans le PLU comme dans la présentation du projet, ce dernier est présenté comme une opportunité pour relier les quartiers de Corentin Celton et de la Mairie mais rien n’est proposé dans ce sens et il est à craindre que, comme pour l’intégration du nouveau quartier dans la ville, rien ne sera fait.
Pour ACTEVI cette liaison doit se faire par l’aménagement de l’Avenue du Général Leclerc entre les deux places, soit : suppression des places de stationnement côté droit en venant de Corentin Celton, réduction du nombre de voies de circulation, élargissement et aménagement du trottoir : mobilier urbain, kiosques, arbres, massifs de fleurs, création d’une véritable piste cyclable…. La grande place à l’entrée du site, comme proposée au paragraphe précédent, s’intégrerait dans cet aménagement de l’avenue.
Toutes ces propositions avaient déjà été faites dans le cadre de l’enquête d’ACTEVI de 2012 sur le Centre-Ville. La dissuasion du trafic de transit avait également été suggérée.
7. Conserver les œuvres d’art signées Marcel Chappey
Il serait souhaitable de conserver sur place les œuvres d’art ornant l’entrée du Bâtiment A, pour marquer la présence du CNET en ce lieu
Conclusion
Même sans viser à l’exhaustivité, l’examen du projet appelle quelques réserves. A l’intérieur de l’îlot, des aspects positifs : espace piétonnier, étagement des immeubles en terrasses, équilibre entre logements, bureaux, commerces et équipements divers.
Mais des nuisances pour les riverains, rejetés hors de cet espace fermé.
A aucun moment, il n’est tenu compte de ce qui se passe au dehors de ce qu’on pourrait appeler « une bulle ».
A aucun moment ne sont évoqués les accès (livraisons, parkings).
(*) Rappelons qu’ACTEVI réclame un centre ville piétonnier ; mais ce centre ville ne doit pas se limiter à un pâté de bâtiments