Comme nous l’avions annoncé au début du mois de février, une enquête publique est actuellement en cours jusqu’au 16 mars 2024. Elle porte sur le Schéma Directeur de la Région Ile de France Environnemental (SDRIF-e), document de référence qui s’impose à tous les autres plans sectoriels. Il prévoit un aménagement de la région jusqu’à l’horizon 2040 et parfois 2050 et doit prendre la suite du SDRIF de 2013. Il a donc une grande importance.
Il n’était pas question de tout reprendre. Un examen approfondi a été fait par la Mission Régionale d’Autorité Environnementale, MRAe, (voir le site, notamment la lettre d’information de février 2023 https://www.mrae.developpement-durable.gouv.fr )
ainsi que par FNE Ile de France (voir notamment le livre blanc de mai 2023 et la contribution à la consultation de l’Institut Paris Région – IPR
https://fne-idf.fr/system.files/2023-06/LPO-IDF-FNE%20IDF-contribution-au-SDRIF.E.pdf ).
ACTEVI a relevé seulement les critiques et améliorations qui pourraient être apportées au SDRIF pour assurer le bien-être des Isséens.
Le SDRIF a pour objectif de garantir un cadre de vie de qualité aux franciliens à l’horizon 2040. Pour obtenir ce résultat :
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Il encadre la croissance urbaine, l’utilisation de l’espace et la préservation des zones rurales et naturelles ,
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Il détermine la localisation des grandes infrastructures de transport et des grands équipements,
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Il développe les moyens de favoriser le rayonnement international de la Région.
EQUILIBRE et DENSIFICATION
Le projet d’aménagement régional recherche un nouvel équilibre entre le centre et la périphérie. L’équilibre entre l’Est et l’Ouest qui était l’un des grands objectifs du SDRIF précédent, serait acquis. Aussi, le SDRIFe prévoie de privilégier un nouvel équilibre axé autour de 139 communes ou groupements de communes identifiés comme polarités. Ces bassins de vie associent le logement, l’emploi, les services, les équipements…
Une de ces polarités appelée Val de Seine est située à Issy les Moulineaux . Elle confirme que la ville demeure un lieu préférentiel d’urbanisation et de densification.
Le point critiquable essentiel est la carte de densité proposée par le SDRIF. On constate qu’Issy demeure un « secteur de fort potentiel de densification » avec, en outre, « des espaces urbanisés à optimiser ». A cela s’ajoute la densification des quartiers proches des gares.
Ce constat, un peu désolant, fait l’objet d’un avis particulièrement intéressant de la MRAe. Au regard de l’objectif fixé par le SDRIF, qui demeure la construction de 70 000 logements par an, la MRAe relève l’importance du nombre de logements vacants. Il était de 404 500 en 2019. Ce nombre est en forte augmentation. Entre 2010 et 2020, il progresse en moyenne de 7 200 logements vacants par an. Aussi, la MRAe considère que la résorption de la vacance de logements ou locaux doit permettre d’éviter l’extension du foncier à urbaniser avec ses conséquences en terme d’imperméabilisation des sols, de coûts de réseaux et services, de temps perdu pour les usagers et de dépendance à la voiture.
La recherche d’espaces à urbaniser en serait allégée. Cette proposition va en outre dans le sens de la recherche du « zéro artificialisation nette » (ZAN). Cette notion, lancée par Nicolas Hulot en 2018, reprise dans la loi Climat résilience du 22 août 2021, a été complétée par plusieurs décrets. C’est l’un des objectifs du SDRIF avec le « zéro émission nette » et le « zéro déchet ». Le ZAN entend privilégier la sobriété en évitant autant que possible une trop grande consommation d’espace, source notamment d’imperméabilisation des sols. Le ZEN s’adresse davantage aux industries et le zéro déchet s’entend de l’instauration d’une économie circulaire.
La MRAe regrette cependant que le SDRIF prévoie une décroissance de 20 % tous les 10 ansde l’extension des terres urbanisées, alors que le reste du territoire national prévoit 50 %. Or il y aurait actuellement 4,4 millions de m2 de bureaux vacants en Ile de France, et donc un gisement important de possibilités même s’il faut convenir que ces locaux sont parfois difficiles et coûteux à reconvertir en logements. Il faudrait donc prévoir désormais des locaux transformables dès leur construction.
Il apparait que le chiffre de 70 000 logements annuels à construire en Ile de France est surdimensionné. Rappelons que le nombre des logements à réaliser par GPSO (T3) était de 2 000 dans le SDRIF précédent datant de 2013 dont plus de 500 à Issy.
POLLUTION RISQUES NATURELS et CHANGEMENT CLIMATIQUE
L’un des corollaires de cette densification est la pollution qui porte atteinte à la santé. Ainsi en 2019, certains habitants au centre de la région étaient exposés à une pollution de l’air au dioxyde d’azote atteignant la valeur limite de la réglementation. Mais les nuisances sonores sont tout aussi néfastes. Certaines sont la conséquence du trafic routier. L’OMS considère que des niveaux sonores supérieurs à 53 dB affectent la santé. De même qu’il existe des zones inconstructibles à proximité des aéroports, l’Autorité environnementale estime nécessaire d’exclure d’une urbanisation accrue ou de développer des moyens efficaces de réduction des pollutions dans les secteurs d‘Ile de France affichant des niveaux sonores supérieurs à 65 dB. La ville d’Issy les Moulineaux est traversée par un important trafic routier dont les conséquences ne sont probablement pas neutres en matière de santé. En outre, une importante usine d’incinération, Isséane, se trouve sur son territoire . Entièrement reconstruite il y quelques années, elle a dû parfois prendre en charge une partie des déchets d’autres usines en rénovation. Bien que l’usine soit très moderne, ses fumées sont susceptibles d’apporter quelques nuisances ne serait ce qu’olfactives.
La MRAe constate que la mobilité régionale se redessine pour prendre en charge l’aspiration nouvelle d’une part importante de la population à une circulation apaisée, moins motorisée. Avec la mise en service progressive du Grand Paris Express (GPE), l’objectif est d’obtenir une baisse de l’usage de la voiture. Mais si la mobilité en transport collectif en Ile de France s’améliore, particulièrement en première couronne et se renforcera avec l’arrivée du métro du GPE, une partie de la région reste fortement dépendante de la voiture pour les déplacements quotidiens. L’urbanisation s’est poursuivie dans des secteurs non desservis par les transports en commun. L’Ile de France a, en conséquence, enregistré une augmentation de près de 400 000 voitures particulières depuis 2011. Cette progression reflète la très forte dépendance de la deuxième couronne à la voiture et une amélioration inégale de l’offre en transport collectif à l’échelle de la région.
Enfin, il convient de prendre en compte l’importance du changement climatique. Un bon tiers du territoire d’Issy est déjà inclus dans le plan de prévention des risques d’inondation des Hauts de Seine (PPRI). Ce risque peut provenir à Issy de la montée des eaux de la Seine, mais également de la montée de la nappe phréatique. La densification de l’urbanisation, source d’imperméabilisation des sols, accroit les risques au cas de pluies violentes. Il serait nécessaire de ralentir le rythme de densification et de prévoir davantage d’espaces naturels.
ESPACES VERTS
Le nouveau SDRIF adopte de nouvelles règles pour lutter contre l’étalement urbain et protéger les espaces naturels et forestiers. Il est prévu de sanctuariser 13 % du territoire francilien et la quasi-totalité des espaces verts de la zone urbaine et périurbaine. 145 espaces verts seront créés ou agrandis pour permettre à chaque francilien d’avoir accès à un espace de nature à moins de 10mn à pied.
Il convient de rappeler que l’OMS préconise que chaque habitant dispose de 10 m2 d’espaces verts accessibles à moins de 10 mn à pied.
Les Isséens ont la chance de bénéficier de plusieurs parcs, jointifs de la ville, qui n’appartiennent pas à la commune : le parc Suzanne Langlen, qui appartient à Paris, le parc de l’hôpital Corentin Celton qui appartient à l’APHP (l’assistance publique des hôpitaux de Paris), le parc Saint Jean Paul II qui appartient au Séminaire, le parc de l’île Saint Germain qui appartient au département. On ne peut s’empêcher de penser qu’il est heureux que ces parcs n’appartiennent pas à la commune quand on voit le traitement subi par le parc Henri Barbusse, qui, lui, appartient à la ville : destruction de l’escalier monumental style arts déco, qui assurait un accès facile aux poussettes et aux fauteuils roulants, remplacé par un escalier en ferraille, une ferme dite pédagogique, qui obstrue une partie de la visibilité de la verdure et dont le ticket d’entrée est quelque peu dissuasif, un abattage d’arbres en grand nombre plus ou moins remplacés partiellement par de petites replantations, dont on se demande quand elles assureront une ombre bienvenue au cas de canicule, implantation d’un hangar de 900m2 (pour une superficie de parc de 4,2 ha) pour les besoins du Grand Paris Express, mais qui, évidemment est utilisé également par les services municipaux, et dernièrement suppression des bancs de l’allée principale , pourtant appréciés par les personnes âgées.
MOBILITE / TRANSPORTS
La Région, polycentrique, doit s’appuyer sur un réseau de transport dense permettant de relier ses différents territoires.
La nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre passe par le développement de transports collectifs toujours plus performants couplés à des modes de déplacements plus souples pour ce que l’on nomme « le dernier kilomètre ». Les mobilités douces sont favorisées et facilitées pour les déplacements quotidiens. Le réseau routier sera fluidifié pour limiter les bouchons et la pollution aérienne qui en découle.
Pour cela, le nouveau SDRIF prévoit notamment :
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70 projets de transport en commun, dont trois projets de navettes fluviales, 2 câbles et 5 nouvelles gares,
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770 km de pistes cyclables,
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34 projets routiers pour 260 kms.
Dans le projet de SDRIF, arrêté par le Conseil Régional du 12 07 2023, figure à l’annexe 3 des orientations réglementaires, intitulée projets d’infrastructure de transport en commun, au numéro 50, la prolongation de la ligne de métro n° 12 au sud d’Issy et jusqu’à Meudon. Mais la réalisation de ce projet pourrait n’intervenir que dans plusieurs années.
L’ACTIVITE ECONOMIQUE
Le nouveau SDRIF entend préserver l’ensemble de la filière agricole francilienne. Il souhaite également réindustrialiser l’Île de France. Pour cela, 27 000 ha dédiés à l’activité économique sont sanctuarisés, dont 54 % pour les activités industrielles.
L’accent sera mis sur le développement de la production d’énergie verte, avec pour objectif d’atteindre100 % d’énergie décarbonée à l’horizon 2050. Pour cela, le SDRIF alloue 1400 ha pour garantir le foncier nécessaire à la transition environnementale (production d’énergies renouvelables, collecte, tri et recyclage des déchets, rétablissement des continuités écologiques).
EN CONCLUSION
FNE IDF a détaillé divers moyens de garantir les améliorations prévues au SDRIF. Les propositions les plus aptes à assurer le bien-être des isséens sont :
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La lutte contre l’hyper-densification en zone urbaine, nuisible pour la santé et dangereuse dans le contexte du changement climatique,
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Faire face au changement climatique par la végétalisation de tout le territoire. FNE IDF propose de garantir dans les espaces carencés 40 % d’espace de nature dans tous les quartiers urbains,
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S’assurer que les bassins de vie prévus dans le SDRIF auront suffisamment d’effet sur les mouvements pendulaires pour limiter le trafic de transit qui encombre Issy,
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Respecter le lit majeur de la Seine et rechercher des solutions fondées sur la nature pour préserver les espaces inondables,
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Faire de la Seine, le point de départ d’un aménagement harmonieux et concerté de notre espace commun ; protéger les îles et les berges de la Seine pour préserver leur biodiversité spécifique. Il faut rappeler que l’aménagement de la promenade sur berge de la Seine à Issy a détruit nombre de frayères (équivalent du lieu de nidification pour les oiseaux)
Enfin, pour encourager l’accès des isséens à la Seine, une navette fluviale avec un arrêt à Issy serait appréciée.